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Vitamine Cagnes
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3 septembre 2008

ESTROSI le portrait brossé

liberattionMotomaire matamore

Christian Estrosi. Ce Sarko boy de 53 ans a abandonné un portefeuille ministériel pour prendre la mairie de Nice, sa ville natale. Histoire pour l’ex-motard de revenir en première ligne.

Christian Estrosi est un maire plein d’astuce. Quand Angelina Jolie accouche dans une clinique niçoise le 12 juillet, il fonce la voir avec le registre d’état-civil pour enregistrer les jumeaux de Brad Pitt. Et il se retrouve en photo dans les gazettes. Pas bête, non ? Le maire de Nice ESTROVAVIONa aussi inventé la Frap, «Force rapide d’action propreté». Composez le 0 800 06 06 40 et en deux heures, tout dépôt sauvage d’ordures sera enlevé. Pas bête, non ? Alors, cessez de l’appeler «le motodidacte». Certes, il a raté le bac parce qu’il faisait de la moto en compétition. Ce surnom déplaisant l’a blessé. Puis il s’en est remis, comme d’une mauvaise chute : «Je revendique d’être un autodidacte. Et pourquoi pas un motodidacte?. C’est plutôt amusant et valorisant.» Mais hors de propos, car il ne fait plus de moto depuis vingt-cinq ans. D’ailleurs, il n’a jamais roulé sur route. «C’est comme si vous demandiez à Guy Drut s’il saute des haies tous les jours.» Il prend plutôt un jet privé pour se rendre à Washington, en janvier dernier, afin de ne pas rater auparavant un pot à l’Elysée. Son caprice de secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer a coûté 138 000 euros.

ESTROSI3Avec Estrosi, la politique tient d’abord de la loterie. Celle que tenait son grand-père italien, Giuseppe, immigré d’Ombrie, face à la gare du Sud à Nice. Il paraît qu’on le voit dans un film, Fandango, avec Luis Mariano. Son père, Roland, a pris la succession. Christian, le fiston, y a traîné ses guêtres, entre paquets de biscuits ou kilos de sucre à gagner. Puis, après dix ans comme coureur pro, il débute en politique en 1983. Ça lui fait un quart de siècle dans le métier. De quoi poser son homme ? Pas si évident. Malgré ses cheveux plaqués en arrière, à l’ancienne, Christian Estrosi, 53 ans, a peiné à se faire respecter. Le genre de gars à qui on tape sur l’épaule en passant. Mais depuis mars, il savoure un changement. «Aucune grande décision nationale ne pourra être prise sans tenir compte de l’avis du maire de la deuxième ville UMP de France», claironne-t-il au lendemain de sa victoire, une des rares pour son camp aux municipales. Même si une défaite, dans cette ville acquise à la droite, était impensable, il profite de l’échec général. «Ce qui fait l’influence d’un homme politique au plan national, c’est son poids local», explique-t-il. Et le sien tient du sumo.

Dans la bonne tradition française, Estrosi manie le grand art du cumulard : maire, député, président de communauté de communes, et président du conseil général des Alpes-Maritimes, où, malgré l’interdiction du cumul, il peut rester grâce au recours providentiel d’un élu PRG (parti radical de gauche). Il s’en délecte : «C’est la gauche qui a décidé de me mettre dans cette situation.» Ajoutez-y, depuis juin, une casquette de secrétaire général adjoint de l’UMP. Et qu’importe si les statuts ne permettent pas d’avoir un troisième secrétaire adjoint : «C’est une volonté du président de la République.» Ce que Sarko veut…

ESTROSI2Revenu à l’Assemblée à la faveur d’une législative partielle en juin, Estrosi y est sa «sentinelle». Mais ça n’a pas suffi. Il a dû l’ouvrir en grand. Si Ségolène Royal a pour lui «l’humanité d’un bigorneau», Estrosi est un requin-marteau qui a cogné pendant des mois contre l’UMP, «armée mexicaine sans véritable chef», «machin snob» aux messages «brouillés». Aujourd’hui calmé, il explique : «Nous avions perdu cette relation avec le peuple de toutes conditions sociales et origines culturelles qui a fait la réussite de Nicolas Sarkozy.» Heureusement, le grand timonier a repris le manche. «On voit bien que la main du président est là et moi, ça me va bien.» Ça lui va d’autant mieux que cette main a imposé Estrosi à Patrick Devedjian, le secrétaire général de l’UMP. Et le résultat est là : «Avec ce poste, il a plus de pouvoir qu’un simple ministre, assure le chef de l’opposition municipale, Patrick Allemand (PS). Mais il a pris les Niçois pour des imbéciles, en prétendant qu’il ne se consacrerait qu’à sa ville.» Pour Estrosi, cette responsabilité compense son départ du gouvernement, après les municipales.

Un nouveau maroquin ne le rebuterait pas. Sarko lui en aurait fait la promesse, mais il temporise : «Pas pour le moment. J’ai à redresser cette ville, c’est ma priorité.» On lui prête des visées sur le ministère de l’Ecologie, ça tombe bien : «Je suis un passionné de l’environnement.» Ça avait échappé à tout le monde. On le connaissait plutôt cognant, version droite très dure, sur les sujets de l’insécurité et de l’immigration. Mais il a changé de marotte et veut faire de Nice «la ville verte de la Méditerranée».

Un effet de la rupture? La politique n’a pas pour autant changé de recettes et à Nice, l’opposition accuse : Estrosi «vide les caisses» du conseil général pour arroser la ville. Patrick Allemand le décrit comme «un homme agité et pressé plutôt qu’un homme qui a une vision cohérente à long terme». Face aux critiques, Estrosi lève à peine un sourcil : «Je ne réponds jamais à l’opposition, qui ne fait que des mensonges permanents. Il n’y a qu’une chose qui compte, c’est le bulletin qu’on met dans l’urne.» En clair : ils ont perdu, qu’ils la ferment. Et en bon politique, il pense à l’élection suivante : «Nous aurons en 2010 cette région à reconquérir.» En 1998, il avait été tenté de pactiser avec le FN pour garder Paca (Provence-Alpes-Côte d’Azur) à droite. Il s’en est finalement abstenu. La région est, depuis, à gauche, alors que ses maires et députés sont en majorité UMP.

Côté famille, Christian Estrosi n’a pas à chercher loin quand il veut discuter de Napoléon III, une de ses marottes, avec sa femme, Dominique : elle est au conseil municipal, élue sur sa liste. Ses deux filles, Lætitia et Laura, 22 et 20 ans, en école de commerce, prendront-elles la succession ? D’après leur père, elles ne sont pas branchées politique. Mais la cadette est accro au ski, et du sport à la politique…

estrofabreDans son bureau, il a affiché sa devise, signée par l’artiste local Ben : «Je dis ce que je fais. Je fais ce que je dis.» Il y a aussi ce qu’il ne dit pas trop, comme son passé de «bébé Médecin». Il sort bien de la cuisse du grand Jacquou, avec qui il a commencé en politique. Mais il n’a pas de casserole judiciaire, même s’il aurait pu être inquiété, en 1990, dans l’affaire du golf de Nice, où un gros trou financier a été bouché grâce au détournement d’une subvention du conseil général (1). L’inaction de la justice lui a épargné tout tracas. «C’était une cabale montée à l’époque, dit-il. Je n’ai jamais connu la moindre mise en examen. Et les électeurs m’ont toujours témoigné leur confiance.» Il a pu le vérifier aux dernières municipales quand le maire sortant, Jacques Peyrat (UMP, ex-FN), bombait le torse : «Personne ne me dira jamais "Cou-couche panier".» Estrosi l’a renvoyé à la niche en se présentant comme l’anti-Peyrat, oubliant qu’il l’avait jusque-là toujours soutenu. Il a aussi assommé une gauche divisée, si bien que la Promenade des Anglais ressemble pour lui à un boulevard. «Même mon opposition m’a dit en aparté : "Avec votre prédécesseur, on rigolait. Avec vous, chacun de vos coéquipiers nous met en difficulté."» De l’assurance à l’arrogance : Estrosi n’est pas un Sarko boy pour rien.

MICHEL HENRY pour LIBERATION mardi 2 septembre 2008

LIRE EGALEMENT CHISTIAN ESTROSI LE SCHPOUNTZ http://www.nouveleconomiste.fr/Portraits/1386-Estrosi.html

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